La résurrection du Pigeon migrateur
Vers une "résurrection" du
« Pigeon migrateur » ?
Pigeon des villes - (c) photo js
Il y a 100 ans disparaissait le Pigeon migrateur (Ectopistes migratorius), mais des biologistes réfléchissent à la possibilité de le recréer à partir d'espèces proches.
Il y a 100 ans disparaissait le ‘Pigeon migrateur’ (Ectopistes migratorius) ou ‘Tourte voyageuse’, un Columbidé qui nichait dans le nord-est de l'Amérique du Nord, et qui hivernait dans l’Ouest et le Sud-est.
Il mesurait de 32 à 40 cm de long, son corps était allongé, ses ailes et sa queue étaient pointues, et sa tête était proportionnellement petite. Il volait rapidement.
Chez l'adulte, le bec était noir, les pattes rouges, les parties supérieures gris bleuâtre, le cou présentait des reflets métalliques, la poitrine et le haut du ventre étaient rouge-orangé, et le bas-ventre et les sous-caudales étaient blancs.
Cet oiseau était encore abondant au début du XIXème siècle, et ses effectifs étaient estimés à plusieurs milliards d'individus. Certains vols "obscurcissaient" le ciel et mettaient plusieurs jours à se dissiper !
Les Pigeons migrateurs nichaient en immenses colonies. En 1871, 136 millions d'individus nicheurs ont été comptés sur 2 200 km2.
L'espèce fut décimée en quelques dizaines d'années, principalement à cause de la chasse intensive, par les agriculteurs qui la considéraient comme ‘nuisible pour les récoltes’, et par des chasseurs, ‘pour le plaisir’.
Ce pigeon a subi aussi la destruction de son habitat, la déstructuration de son mode de vie social suite à la baisse des effectifs, et certaines maladies.
Il a définitivement disparu en 1914.
Mais grâce aux progrès de la génétique, certains biologistes évoquent désormais l'idée de ‘ressusciter’ cette espèce.
L'ADN d'oiseaux morts depuis longtemps contient des informations précieuses qui peuvent aider à mieux comprendre les relations phylogénétiques entre espèces vivantes et éteintes et leur évolution génétique.
Mais le génome se dégrade, et le séquençage à partir de fragments d'ADN n'est pas possible si l'on utilise une méthode d'amplification génique classique.
Une technique nouvelle appelée ‘De Novo Assembly’ a été élaborée, et décrite en détail dans un article paru en 2013 dans la revue PLOSOne.
Elle permet de reconstruire des séquences à partir d'un grand nombre de petits morceaux de 90 paires de bases, selon un grand nombre de paramètres. Elle a été appliquée avec succès sur des échantillons de deux Pigeons migrateurs et on a pu reconstituer la totalité de leur ADN, malgré une légère pollution génétique humaine et un faible pourcentage de nucléotides dégradés.
Parmi les approches proposées pour recréer des Pigeons migrateurs, figure l'extraction d'ADN ancien de spécimens naturalisés, suivie par la modification du génome de Pigeons à queue barrée (Patagioenas fasciata) ou Pigeon biset (Columba oenas).
Lors du congrès de février 2012 de la Long Now Foundation, le généticien George Church a expliqué qu'il était impossible d'utiliser la technique du clonage, car l'ADN des spécimens naturalisés n'est plus fonctionnel.
Mais l’on pourrait reconstruire certains gènes du Pigeon migrateur puis les introduire dans le génome de cellules-souches de Pigeons bisets afin de faire réapparaître certaines caractéristiques de l'espèce disparue, comme sa longue queue par exemple.
Ces cellules-souches modifiées pourraient ensuite être transformées en cellules germinales (précurseurs des ovules et des spermatozoïdes) qui seraient injectées dans des oeufs de Pigeon biset, où elles migreraient vers les organes sexuels des embryons en cours de développement.
Les pigeonneaux éclos ressembleraient à des Pigeons bisets normaux mais ils seraient porteurs de cellules germinales modifiées.
En se reproduisant, ils donneraient naissance à une génération dont certains individus auraient certaines des caractéristiques du Pigeon migrateur (couleurs, longue queue, longues ailes...).
Une succession de croisements et de sélections pourrait finir par produire des oiseaux ressemblant plus ou moins à l'espèce disparue.
Toutefois, cette méthode audacieuse soulève plusieurs questions.
Un pigeon recombiné peut-il être considéré comme un Pigeon migrateur ?
Cela vaut-il le coup de réussir éventuellement à créer une poignée d'oiseaux qui pourraient ne réussir à survivre qu'en captivité ?
La viabilité de cette espèce sociable n'implique-t-elle pas de devoir aussi produire des millions d'individus ?
Cette "résurrection" pose aussi des questions éthiques : faire renaître des espèces éteintes ne va-t-il pas diminuer les efforts pour empêcher les extinctions ?
Faire revivre des espèces disparues est-il utile ?
Et il y a enfin des obstacles financiers.
Je me suis basé sur un article du site Ornithomedia, que je vous suggère de consulter.
http://www.ornithomedia.com/breves/vers-resurrection-pigeon-migrateur-01204.html
Sources
Chih-Ming Hung, Rong-Chien Lin, Jui-Hua Chu, Chia-Fen Yeh, Chiou-Ju Yao, Shou-Hsien Li mail (2013). The De Novo Assembly of Mitochondrial Genomes of the Extinct Passenger Pigeon (Ectopistes migratorius) with Next Generation Sequencing. PLOSOne. Date : 20/02.www.plosone.org/article/info%3Adoi%2F10.1371%2Fjournal.pone.0056301#pone-0056301-g004
Birdwatchingdaily (2013). The challenges of bringing the extinct Passenger Pigeon back to life. Date : 05/02.www.birdwatchingdaily.com/blog/2014/02/05/the-challenges-of-bringing-the-extinct-passenger-pigeon-back-to-life/
Ronald Sander (2013). The Ethics of Reviving Long Extinct Species. The Ethics of Reviving Long Extinct Species. Conservation Biology. http://onlinelibrary.wiley.com
Jacques Schwers
Le 22 avril 2014
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